Je suis inquiet à propos des changements climatiques. Nous avons eu un bel automne : c’est magnifique! Mais il a fait étrangement chaud en ce mois de novembre… Est-ce un signe que les temps changent? Peut-être ou peut-être pas non plus… Difficile à dire! Ce qui est sûr, c’est que, de plus en plus, les scientifiques confirment que le scénario le moins probable au départ (un réchauffement de la température moyenne de la planète de 6 °C en 2100) serait celui vers lequel on se dirige assurément, alors que le scénario de 2º était envisagé à l’origine comme étant le plus probable (et déjà très sérieux tout de même quant à ses conséquences), compte tenu de la mollesse des mesures adoptées jusqu’à présent et du rythme des émissions de gaz à effet de serre actuel qui continuent d’augmenter de façon importante.
Ce qui m’inquiète, c’est que souvent on traite de cette question avec légèreté, voire même avec un certain enthousiasme : il fera moins froid au Québec, ce sera tant mieux! Mais c’est là témoigner d’une ignorance totale des conséquences d’un réchauffement, si minime soit-il, sur le climat global de la planète. Les gens oublient que le climat de la planète est un système complexe qui tient à un équilibre fragile. Une légère modification de la donne et tout peut chavirer. Ne connaissez-vous pas l’effet papillon? Et le phénomène d’emballement? Il suffirait que nous dépassions un seuil critique pour que les phénomènes climatiques se multiplient et se déchaînent. L’équilibre est si fragile. Dans le corps, dans la société… et aussi pour le climat.
La fonte rapide des glaces aux pôles et l’augmentation des températures qui y sont observés pourraient avoir aussi un impact sur le fameux Golf Stream qui régule la température de la planète entière. On sait que ce courant marin géant plonge en profondeur à la hauteur du Groënland. Ce mouvement est engendré par le refroidissement de ses eaux au contact des régions arctiques qui, alors, se densifient et sont entraînées ensuite vers les abîmes. Elles poursuivent ensuite leur trajectoire en sens inverse et remontent peu à peu, à mesure qu’elles se réchauffent, vers la surface (pour ressurgir dans les océans Indien et Pacifique) et le courant devenu chaud reprend ensuite son cours vers l’océan Atlantique. Cette immense boucle agit donc comme un appareil de climatisation et de régulation pour notre planète. Un équilibre très fragile qui est menacé par ce réchauffement inopiné qui pourrait en perturber le mouvement…
Mais loin de moi l’idée de jouer les prophètes de malheur. Il reste tout de même difficile de prévoir ce qu’engendreront ces changements à long terme. Les scientifiques y mettent tout leur savoir et toute leur expertise… et ce n’est pas chose facile de prédire un phénomène aussi chaotique. Mais forts de leurs observations, ils sonnent de plus en plus l’alarme, tentant de faire réagir les têtes dirigeantes de nos gouvernements et de notre système capitaliste, comme les populations, à un problème qui, à plus ou moins long terme, pourrait être catastrophique pour tous les habitants de la planète, et aussi sur le plan économique (pour parler leur langage, le seul qu’ils comprennent). Les autres habitants de la planète savent bien pourtant que là ne seront pas les seules conséquences! Mais bon…
Ce qui m’inquiète surtout, c’est que, à quelques jours de la conférence de l’ONU sur les changements climatiques à Copenhague où se jouera l’essentiel de l’avenir de la planète, on ne sent pas que les enjeux sont pris au sérieux par nos gouvernements et les décideurs de tout acabit. Le Canada fera probablement piètre figure encore… et fera preuve de peu d’initiative pour s’attaquer à ce problème. Il y a là pourtant tout un beau défi pour notre génération actuelle, un défi qui pourrait galvaniser les énergies de nos sociétés et stimuler la créativité de tous. Voire même l’économie, si l’on y met un peu de volonté politique! Aussi, pourront arguer certains détracteurs, on ne peut savoir réellement ce qu’en seront les conséquences… et comment prouver que les humains y sont vraiment pour quelque chose? Alors, pourquoi s’en faire? Je pense que certains refusent de voir l’évidence − c’est de la cécité − par peur d’assumer l’angoisse qu’une telle situation suscite. Alors, diront-ils, profitons donc de la vie à plein, et continuons de faire rouler la machine (même si elle grince!), sans se soucier du reste!
C’est là, à mon avis, que la sagesse doit intervenir. Se jeter dans une activité sans en connaître les dangers et les conséquences m’apparaît comme de l’immaturité. Il ne s’agit pas non plus d’adopter l’attitude du timoré qui s’enferme dans sa tour pour éviter toute confrontation. Il s’agit ici d’une autre forme d’immaturité. On peut connaître le danger et évaluer les risques… sans s’empêcher de vivre l’aventure. Mais quand un doute subsiste, il est parfois sage de ne pas tenter le diable. Ce qu’on appelle, dans un langage plus scientifique, le principe de précaution. À mon avis, à Copenhague, nos décideurs doivent avoir le courage d’élargir leur vision pour penser à plus long terme (à l’avenir des prochaines générations, comme le proposent si bien les Amérindiens) et d’appliquer − c’est le moins qu’on puisse faire − ce principe de précaution en choisissant d’adopter de fermes mesures pour diminuer la quantité des émissions en deçà des niveaux de 1990, comme le proposait Kyoto. Il faut du courage pour soutenir une telle vision! Pourtant, on perçoit déjà les signes de ce qui nous pend au bout du nez. Il ne faut pas attendre d’avoir le nez collé au mur pour réagir. La force de frappe est beaucoup moindre alors… C’est peut-être là le grand défaut de l’humanité : attendre à la dernière minute. Pourtant, il est déjà minuit moins une à ce propos. Réagissons! Écrivons! Manifestons notre mécontentement. Et faisons notre part à notre mesure. Pour notre bien-être à tous…